dimanche 1 mars 2009

Myrtho Gauthier, notre première romancière

À La Tuque, on se souviendra sûrement d’avoir vu, au Téléjournal de Radio-Canada, les reportages d’une dame Gauthier, au prénom peu usuel de Myrto. Sait-on, par contre, que cette journaliste est originaire de notre ville ? Qu’elle est l’auteure en 1947 du tout premier roman écrit par quelqu’un d’ici à avoir été édité en librairie ? Bien sûr, les gens vont me rappeler qu’il y avait eu en 1946 le fameux Pieds nus dans l’aube, du grand Félix Leclerc, qui en était déjà à son quatrième ouvrage. Le livre avait paru à la fin de l’année précédente, mais ce n’était pas un roman. C’est un récit autobiographique, non une véritable fiction. Le roman de madame Gauthier est une histoire inventée, qui se passe en Égypte, bien loin de La Tuque.

Page de couverture du roman LA DAME DE SAHIB, paru en décembre 1947,
à Montréal, aux Éditions Valiquette.
Sauf indication contraire, illustrations et documents
sont extraits de mes archives personnelles.


Myrto Gauthier est née, le 30 décembre 1923, à La Tuque, dans une famille qui comptera 10 enfants, dont sept survivront. Son père, Charles Gauthier, était de La Croche et travaillait comme journalier à l’usine de la Brown Corporation. Il est décédé le 27 janvier 1985. Éloïde Gauthier, son grand-père, a eu un moulin à scie aux Piles détruit par un incendie. Il a décidé de le reconstruire à La Croche. Sa mère, Azilda Couture, avait été en 1918, l’année précédant son mariage, la ménagère d’Eugène Corbeil, le curé fondateur de la paroisse Saint-Zéphirin de La Tuque. Elle est décédée le 8 janvier 1957 et toute sa vie aura été consacrée à sa famille.

Les enfants Couture-Gauthier posant devant le domicile
familial, rue Saint-Antoine, à La Tuque. Debout, de gauche à droite : Laurent, Laurence, Fernande (décédée en janvier 2008), Myrto et Paul. Assis : Robert et Collette.

Après ses études primaires et secondaires chez les sœurs de l’Assomption, elle a fréquenté l’École normale des ursulines, à Trois-Rivières, pour devenir institutrice. En 1941, elle va donc enseigner à l’école primaire de la rue Desbiens.

Myrto Gauthier chez les ursulines de Trois-Rivières.

Par la suite elle travaillera à la Canadian International Paper et à La Tuque Téléphone. En 1951, elle donnera des cours de préparation au mariage. Par la suite, elle se rend à Ottawa, pour travailler au ministère des Affaires étrangères, puis à Montréal, où elle est recherchiste pour la commission Laurendeau-Dunton sur le bilinguisme et le biculturalisme. Comme elle est douée pour les langues, elle en parle cinq (à La Tuque, elle aimait échanger en portugais avec un voisin), elle entre en 1965 au service des nouvelles de Radio-Canada. Elle a été appelée, par exemple, à couvrir les funérailles du pape Pie XII et l’avènement de Jean XXIII, en 1958. À la fin des années 1970, elle est nommée correspondante en Angleterre. C’est la deuxième femme seulement à être nommée à l’étranger. Au moment de prendre sa retraite, elle était attachée de presse. Elle a été secrétaire de l’Association provinciale des employés à la retraite de Radio-Canada.

En 1982, un article du troisième volume du Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec nous permet de connaître l’intrigue du seul roman de Myrto Gauthier. On y constate que son récit a suscité peu de commentaires dans les revues et les journaux. Quatre seulement, dont celui du quotidien libéral du temps, Le Canada, et celui de la Revue de l'Université Laval.


La notice biographique contient des erreurs, dont celle de
penser qu’en 1940 La Tuque était un «village».

Myrtho Gauthier a remporté des prix lors de concours littéraires, dont celui de Radio-Canada, en 1946. Un texte à caractère historique, « Autour d‘un édit», lui mérite un troisième prix et il sera diffusé à la radio.

Micheline Roy-Raîche, native de La Tuque, m’a gracieusement fournie cette
coupure de presse de 1946, retrouvée dans les archives de sa belle-mère,
Claire Gervais-Roy, premier prix du concours.
Sur cette photo, Myrto Gauthier a 21 ans.

À la droite de Myrto Gauthier (deuxième à partir de la droite), Bella Mercier Rochette,
une Latuquoise, dont l’œuvre présentée à ce concours a aussi été diffusée à Radio-Canada.
Coupure tirée de l’hebdomadaire Radio-Monde, 6 mai 1946,
et aimablement fournie par Micheline Raîche-Roy.


Le fonds d’archives des éditions Valiquette, à la Bibliothèque nationale du Québec, à Montréal, contient une lettre de Bernard Valiquette. Elle date du 24 juillet 1947 et est adressée à Myrto Gauthier, 82, rue Saint-Antoine, à La Tuque. L’éditeur lui annonce que son roman, LA DAME DE SAHIB, sera tiré à 2000 exemplaires et qu’il sera disponible en décembre.

On peut revoir un reportage de Myrto Gauthier à Radio-Canada, celui de l’élection de Margaret Thatcher : http://archives.radio-canada.ca/c_est_arrive_le/05/03/.

Grande adepte du jeu Scrabble, elle a participé à plusieurs tournois. On trouve cette phrase de l’un de ses textes, transcrite dans une page consacrée à ce jeu :
«Pour les yeux voilés d'une sombre hétaïre raffinée qui dansait le slow chez Mackav, un gitan jaloux et timbré s'est poignardé.» – Myrto Gauthier («Drame sur les bords du Guadalquivir»).

Elle aime toujours se rendre à l’étranger. Elle revient tout juste d’un séjour dans les Caraïbes, en compagnie de sa sœur Collette.

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6 commentaires:

  1. Bravo M. Tremblay, très belle entrée en la matière et très belle présentation. Je suis heureux d'émettre le premier commentaire sur votre nouveau blogue. Je suis certain que celui-ci aura beaucoup d'intérêts pour les gens de La Tuque qui sont intéressés par leur histoire. Encore une fois bravo et continuer votre bon travail. »

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  2. Quelle découverte et quel réconfort de retrouver M. Hervé Tremblay cet inlassable et fascinant historien autodidacte latuquois!
    Sa mémoire phénoménale alimentée par une documentation hors du commun fait de lui le plus fascinant raconteur de l'histoire latuquoise.
    Ce blogue lui permettra de retrouver enfin sa liberté d'expression. A nous de l'apprécier à sa juste valeur et de le remercier pour son apport inestimable pour toute la Haute-Mauricie.

    Bravo! Merci!

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  5. Félicitations M. Tremblay . C'est un grand plaisir de lire au sujet de l'histoire de La Tuque, non seulement pour les La Tuquois, mais aussi pour ceux et celles qui sont partis de leur ville natale depuis longtemps.
    Votre blogue est très intéressant. Et pour moi, quelle agréable surprise d'y retrouver le nom de mon grand-père, Jim Monahan, vétérinaire, qui s'est occupé des chevaux pour la Brown à La Tuque pendant environ vingt-cinq ans. Merci et au plaisir de lire vos prochaines pages!
    Maureen Monahan O'Neill

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  6. Très,très intéressant et en plus beaucoup de classe. C’est diablement bien parti.

    Continuez votre beau travail et La Tuque va passer à l’Histoire.

    Jean Cantin
    Lac a Beauce

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